jeudi 21 août 2008

Le soufisme, la voie du mysticisme en islam

Le soufisme, la voie du mysticisme en islam

Longtemps connu des seuls initiés, le soufisme sort enfin ou presque de son isolement. Grâce à la présence récente d’une troupe de qawalis, venue de l’Inde, et des causeries philosophique. Le maître soufi Idris N. Mahmoud évoque la place du soufisme au sein de cette rencontre des idées humanistes.

Sheik Idris
Tout est blanc chez le cheikh Mahmoud – sauf la barbiche poivre et sel – et le kurtah. Même la grande chambre où il reçoit amis et élèves. Le blanc, synonyme de pureté. Idris Mahmoud porte le sourire en bannière, comme pour désarmer ceux qui lui cherchent la petite bête. C’est que depuis qu’il cultive le soufisme et l’offre en partage, ses convictions ne cessent d’ébranler ceux qui croient que la foi se résume à des rituels sans âme et au nombre d’édifices religieux. “Il n’y pas de confrontation entre les soufis et les autres, seulement une divergence d’appréciation”. De là à accuser ces mystiques de se prendre pour de “meilleurs” croyants, il n’y a qu’un pas…
De ses années d’enseignant, ses voyages – une trentaine de pays visités –, ses rencontres, Idris Mahmoud a conservé le goût pour les explications de fond. On comprend dès lors qu’il s’attache à l’essence, au sens caché, aux nuances. Chaque année, presque à la même période, il se rend dans le faubourg de Londres à la rencontre de ses disciples. “Je me ressource. Les voyages sont nécessaires lorsqu’on vit dans une île et qu’on veut nouer des contacts”, explique ce diplômé en études islamiques et en relations internationales, du Pakistan. Le soufisme, il l’a hérité d’un père, homme d’affaires mais aussi de ses propres convictions. Puis, il a essayé de trouver des réponses à ses interrogations pour se dépasser. Ce sera le début du voyage intérieur propre au soufisme. “On se cherche parce qu’on veut se purifier pour ensuite s’adresser aux autres. Ce n’est pas un voyage pour soi-même sinon ce serait une démarche individualiste”, précise-t-il. Lorsqu’il croise, à 26 ans, le maulana Noorani Siddiqui, il est déjà en possession des clés essentielles pour ouvrir les voies de la sagesse.
Le monde ambiant
Aujourd’hui, il s’efforce de démontrer la vanité des rituels si ceux-ci ne permettent pas aux individus de se libérer du monde matériel pour mieux appréhender la parole du prophète. “On a l’impression qu’il n’y a que la loi aujourd’hui. Or, la loi sans l’amour, c’est l’anarchie. La spiritualité, c’est l’amour”. Mais il ne faut pas se méprendre. Le soufi ne pointe pas du doigt un Occident qui serait responsable des dérives morales de toute l’humanité.
“C’est à l’individu de trouver sa voie. Il n’existe pas de monde divisé en bien et en mal. Certains attendent sans doute que je verse dans une critique acerbe du monde occidental et j’en appelle à sa destruction”. ll y a deux ans, Idris Mahmoud a même dit des prières à l’invitation de l’ambassade américaine à Maurice. Pour mieux aiguiser sa pensée et surtout contribuer à la promotion des cultures, il s’intéresse aux autres religions, l’hindouisme et le christianisme, la pensée gréco-romaine, le bouddhisme. “Il faut en finir avec cette image du musulman replié sur sa religion et incapable de comprendre le monde ambiant”. Même s’il se veut, comme d’autres maîtres ayant atteint la “lumière”, l’incarnation de la Parole venue du Ciel, il se refuse à revêtir les habits de l’islamogue déterminé à redorer l’image de l’islam, quelque peu ternie par des actions extrêmes. “ Il appartient à tout le monde de démontrer que ce n’est pas cet islam-là qui pose des bombes”.
Car l’islam que revendique Idris Mahmoud prend racine à la fois à Cordoue, Bagdad, Delhi ou encore Le Caire, quand des docteurs de la foi échangeaient une riche et féconde correspondance avec leurs coreligionnaires juifs et chrétiens. “Il n’y avait aucune loi qui interdisait ces échanges qui portaient sur des questions philosophiques”. A quel moment l’islam a perdu cette aura flamboyante pour laisser place à certaines écoles de pensée intolérantes ?
Des conflits de chapelles
“Tout est parti de l’interprétation des hadiths. Chacun a cru puiser dans le Coran des conduites qui correspondent à ses actions. Ensuite, on a présenté ça comme l’enseignement. Il en est résulté des conflits de chapelles”. Comment, dès lors, trouver une voix unique et fiable pour rassembler les disciples du prophète… D’autant qu’il n’existe pas de clergé chez les sunnites, courant majoritaire de l’islam, alors que les chiites d’obédience iranienne possèdent une hiérarchie très structurée et qui leur dicte leur conduite de tous les jours. “Face à cette absence, explique Idris Mahmoud, il reste au musulman Le Livre. Mais il lui faut un guide pour bien en cerner le contenu et s’éloigner d’une lecture erronée. Le Coran est comme une barque sur l’eau, on ne doit pas la remplir d’eau, au risque de couler”. Reste l’éternel débat qui oppose les docteurs de la foi et récitants dans les mosquées, à ces multitudes confréries, dont le soufisme, qui choisissent la voie de l’initiation, plus restreinte, longue et tortueuse. “C’est vrai, admet Idris Mahmoud, que le soufisme impose des exigences, car, au nom de cet amour sans partage pour Dieu, on ne se contente pas d’une lecture simpliste du Coran”. C’est cette recherche du symbolisme qui permet d’établir des confluences avec les autres religions. Au terme d’une réflexion commune, chacun aboutit à la même conclusion : “Il faut préserver l’humanité et son environnement, réduire les risques de conflits. Pour y arriver, il faut se débarrasser de tout sentiment de jalousie, de haine et de colère.”

Source : http://www.sheikidris.com/?p=8

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