jeudi 19 novembre 2009

Le mérite des 10 premiers jours de Dhul Hijjah

Le mérite des 10 premiers jours de Dhul Hijjah

Shaykh Faraz Rabbani

Les 10 premiers jours de Dhu’l Hijjah sont des jours bénis : Dieu lui-même a juré par eux dans le Qur’an:

“Par l’Aube!
Et par les dix nuits!”
[Qur’an, Surat al-Fajr, 89.1-2]

Les commentateurs sont généralement d’accord que le terme « les dix nuits » se réfère aux dix premiers jours de Dhu’l Hijjah, Comme on peut le trouver dans le livre du Shaykh al-Islam Abu Su`ud, Irshad al-`Aql al-Salim ila Mazaya al-Qur’an al-Karim [Le célèbre Tafsir Abi al-Su`ud, 9.153] ou dans Tafsir al-Jalalayn .

L’Imam Ahmad et Nasa’i rapportent de la Mêre des Croyants, Sayyida Hafsa que :
« Le Messager de Dieu n’a jamais délaisser 4 choses : Jeûner le jour d'Achoura [10 du mois de Muharram], [durant] les dix jours [de Dhu’l Hijja], et trois jours par mois. »
Rapporté par l'imam Ahmad, Abû Dâwûd et An-Nasâ'î.

1. Jeûner les neuf premiers jours, plus spécialement le jour de ‘Arafah (9ième)

Les savants sont d’accord qu’il est recommander de jeûner durant les neuf premiers jours de Dhu’l Hijja. (Le dixième jour est le jour de l’Aïd, et il n'est où permis de jeûner ce jour.) Kashshaf al-Qina`[/I]; Nawawi,Majmu`; Fatawa Hindiyya; Haskafi, Durr al-Mukhtar; Dardir,al-Sharh al-Saghir]

De ces jours, il est plus particulièrement recommandé de jeûner le Jour de ‘Arafah [9ième de Dhu’l Hijjah], même pour celui qui accomplit le Hajj dans l’école Hanafite, si cela n'affaiblit pas le pèlerin pendant son devoir et ses adorations. [Haskafi, Durr;Kasani, Bada’i`]

Quant aux hadiths dans lesquels le Prophète commande de ne pas jeûner le Jour de ‘Arafah au pèlerin, les imams Hanafites ont compris que cela se rapportait à ceux qui seraient affaiblis ou fatigués. [Explication de l’Imam Tahawi dans Sharh Ma`ani al-Athar, 2.82-83]

Ceci en se basant sur les nombreux hadiths qui font l'éloge de ce jour en particulier et du fait de le jeûner. Parmi ces hadiths nous trouvons:

Abu Qatada, rapporte que le Messager d’Allah à dit :

« Jeûner le Jour de ‘Arafah [9ième de Dhu’l Hijja] efface les péchés de deux ans, de l'année écoulée et ceux de l'année à venir. Et jeûner le Jour de ‘Ashura [10ième du mois de Muharram] efface les péchés de l’année écoulée »

Rapporté par Muslim, Abu Dawud, Nasa’i, and Ibn Majah

2. Faire des efforts dans les actes d'adoration durant ces dix jours.

Il est aussi recommandé d’occuper ces jours par les actes d’adorations. Citons l'Imam Sharaf Al-Din Al-Hijjawi le grand faqih Hanbali, dans son Al-Iqna`, :

« Il est recommandé de s’efforcé a faire de bonnes actions pendant les dix premiers jours de Dhu'l Hijjah, tel que le souvenir d'Allah (dhikr), le jeûne, faire l’aumône, et d'autres bonnes actions, parce qu'ils sont les meilleurs des jours. » [Kashshaf Al-Qina` de Buhuti, 2.60]

Ceci est confirmé par les savants des 4 madhabs Sunnites. al-Bahr al-Ra’iq; Haskafi/Ibn Abidin, Radd al-Muhtar `ala al-Durr al-Mukhtar; Nawawi, al-Majmu` et d’autres

Plusieurs savants ont déclaré que la période de ces dix jours est meilleure que les dix derniers jours de Ramadan, en raison de la force des sources textuelles qui y sont liés.

3. Passer les nuits de ces jours en prière et en adoration.

Il est particulièrement recommandé de passer une certaine partie de chacune des nuits de ces dix jours dans la prière et l’adoration.

[Nawawi, Majmu`; Ibn Qudama, Mughni; Dardir, al-Sharh al-Saghir; Ibn Nujaym, al-Bahr al-Ra’iq;al-Fatawa al-Hindiyya; Ibn Abidin/Haskafi, Radd al-Muhtar `ala al-Durr al-Mukhtar]

Ceci a été déduit par des traditions claires, tels que les mots du Prophète (saws)

" Il n'y a pas 'œuvres meilleures que celles faites en ces 10 jours. » Les Compagnons dirent : « Même pas le Jihâd ? » Il dit : « Même pas le Jihâd, sauf un homme qui sortirait risquant sa vie et ses biens et qui ne reviendrait avec rien (c'est à dire qu'il y perdrait sa vie et sa fortune). »

Rapporté par Al-Bukhârî et d’autres

Puisse Dieu nous donner le succès dans ces jours et ces nuits bénis, et dans chaque moment de nos vies, pour suivre le chemin de son prophète (saws) , et puisse t’Il faire de nous ceux qu'Il aime et qui L'aiment.

Wa alaikum assalam

Faraz Rabbani

http://qa.sunnipath.com/issue_view.asp?HD=1&ID=751&CATE=105 (http://qa.sunnipath.com/issue_view.asp?HD=1&ID=751&CATE=105)

mercredi 18 novembre 2009

Un soufi réformiste, le shaykh Muhammad Hasanayn Makhlûf (1861-1936) Imposteurs et faux-soufis (6sur8)


Imposteurs et faux-soufis

Très tôt dans l'histoire du soufisme, une nette distinction s'est faite entre le soufi qui aspire à une vraie spiritualité et celui qui prétend être soufi mais qui n'est en réalité qu'un dangereux imposteur. Entre la fin de l'époque mamelouke et le début de l'époque ottomane, la polémique était vive autour de ces personnages : « Le passé renvoyant toujours à « l'originel », on ne s'étonnera donc pas que les maîtres du tasawwuf de toutes les époques décrivent et attaquent dans des termes similaires les pseudo-soufis qui pervertissent le tarîq... Qualifiés de mudda'un (imposteurs), de dukhalâ' (intrus), ils appartiennent au monde rural et sont accusés de vouloir connaître Dieu sans même connaître le Coran ; ils initient des disciples sans avoir eux-mêmes suivi le cheminement initiatique. Enfin, ils sont animés par l'amour du pouvoir et des biens matériels et abusent de la crédulité et de l'ignorance du peuple » (Geoffroy, 1995 : 176). Au XXe siècle, les attaques répétées des shaykh-s réformistes comme des laïcs contre certains aspects du soufisme intensifient la polémique autour des confréries populaires. Les soufis lettrés accusent de tous les maux les confréries comme l'Ahmadiyya et la Burhamiyyâ qui puisent dans le creuset des populations rurales du Delta. Toutes leurs critiques sont concentrées dans l'épître Al-Qawl al-wathîq.


L'auteur fait la distinction entre les membres de ces confréries (arbâb al-turuq) et les vrais soufis (al-sûfiyya, ahl al-tarîq), turuq (pluriel de tarîqa) étant devenu un terme péjoratif traduisant le sectarisme qui règne au sein des confréries. M. H. Makhlûf débute son épître en rappelant que toute personne qui se rend coupable d'innovation (bid'a, muhdatha) en matière religieuse et s'écarte de ce qui est prescrit par le Coran et la Tradition du Prophète ne fait plus partie de la communauté des musulmans. Il mentionne le hadîth qui exhorte le musulman à combattre, suivant ses moyens, tout acte illicite dont il est témoin. Ce devoir incombe avant tout à ceux qui possèdent l'autorité religieuse, c'est-à-dire les 'ulamâ', gardiens de la loi divine et guides de leur communauté. Selon une vision de l'histoire largement répandue chez les 'ulamâ', M. H. Makhlûf souligne que ces pratiques non islamiques ont été introduites au sein des confréries égyptiennes par des éléments étrangers qui, sous l'apparence de soufis, ont occupé les khânqâ-s à la fin du IVe siècle de l'hégire (Makhlûf, 1926 : 5). Il vise, sans les nommer, les soufis d'origine turco-persane. À l'époque médiévale, ces derniers sont qualifiés par les soufis égyptiens de déviants, dans leur comportement, leur aspect physique, par les emblèmes déployés (bannières, tapis, cannes) dont certains seront repris par les confréries égyptiennes (Geoffroy, 1995 : 254). Leur influence, qui s'amplifie à l'époque ottomane, explique, selon M. H. Makhlûf, le développement d'un soufisme populaire en Egypte. Il souligne que ces pratiques auraient pu rester limitées à ces groupes si les grands 'ulamâ' avaient tenu leur rôle de guides et ne s'étaient pas coupés des musulmans. Ces derniers se sont tournés vers les confréries et les bid'a se sont répandues au sein de la 'âmma, le commun des croyants. L'auteur reprend ici les critiques formulées avant lui par des soufis lettrés comme Sha'rânî : celui-ci reprochait aux ulamâ' leur détachement à l'égard des problèmes de leur société et leur soumission, par intérêt et vénalité, au pouvoir ottoman. Il reconnaissait en revanche que les shaykh-s de zâwiya remplissaient un rôle vital dans la société (Garcin, 1969 ; Winter, 1982).

Après avoir présenté les facteurs historiques qui expliquent selon lui la décadence du soufisme et donc, de l'islam en général, M. H. Makhlûf choisit de répondre aux questions qui lui ont été posées par des 'ulamâ'. Elles concernent d'abord le dhikr, pratique spirituelle par excellence des soufis qui consiste à mentionner Dieu par ses différents Noms, individuellement ou collectivement, à voix haute ou basse et de manière répétitive. Plus que tout autre pratique soufie, le dhikr fut la cible des attaques des réformistes, car il est le rituel le plus spectaculaire. Les participants se tiennent debout, en rangées serrées et tournées vers leur shaykh, et rythment le dhikr par des mouvements de la tête et du haut du corps, d'avant en arrière ou de droite à gauche, les pieds posés à plat sur le sol. Au fur et à mesure que le rythme du dhikr s'accélère, les mouvements du corps deviennent plus rapides, le son des voix s'amplifie, certains disciples peuvent perdre le contrôle d'eux-mêmes, entrer en transe. Le dhikr est rythmé par la voix d'un munshid qui chante (inshâd) les louanges du Prophète, des membres de sa famille (ahl al-bayt) et des saints ; il est accompagné d'un orchestre composé d'une sorte de clarinette (mizmâr), d'une flûte, d'un tambourin (tabla) et parfois de castagnettes. Le dhikr en lui-même n'était pas attaqué mais c'est la manière dont il était pratiqué qui a soulevé la colère des réformistes. Pour R. Ridâ, il ne restait du dhikr que des bruits et des mouvements. Les soufis lettrés eux-mêmes ont condamné la façon dont le dhikr a été déformé. Ahmad Sharqâwî a consacré toute une épître aux techniques du dhikr, épître commentée par M. H. Makhlûf. Ce dernier précise dans Al-Qawl al-wathîq que le dhikr fait dans les règles est la plus importante des pratiques de la voie soufie et le moyen le plus efficace pour purifier son cœur et s'approcher de Dieu. Il cite les nombreux versets du Coran et les hadîth-s qui fondent cette pratique. Cependant il admet que le dhikr, tel qu'il est pratiqué à son époque, ressemble plus à de la danse et à la recherche de l'extase qu'à la concentration de l'esprit sur Dieu (Makhlûf, 1926 : 16). Il critique surtout la manière dont les pseudo-soufis déforment la prononciation des Noms divins (al-dhikr al-muharrafa) : il n'hésite pas à qualifier ces derniers, ainsi que ceux qui les écoutent, d'incroyants (kuffâr). Il reproche à ceux qui assistent au dhikr de s'y rendre comme à un spectacle et d'être plus sensibles à la voix du munshid qu'au contenu des récitations. De fait, il condamne l'utilisation d'instruments de musique pendant le dhikr, de même que l'habitude de battre des mains pour accompagner le chanteur.


En revanche, M. H. Makhlûf défend certains symboles soufis comme le port de l'habit rapiécé (khirqa). Son maître, Ahmad Sharqâwî déplorait que ces symboles fussent le plus souvent portés par des imposteurs : « Sache, écrivait-il, que le vêtement d'investiture (khirqa), la bannière ('alam al-rayâ) et la ceinture (hizâm) ne sont pas la finalité de la voie, la voie étant la lutte contre les inclinations mauvaises de l'âme (mujâhadât al-nafs) et l'attachement au Coran et à la Sunna » (Sharqâwî, 1889b : 145). Généralement, plus un soufi est lettré, moins il met en avant son appartenance à la confrérie en tant qu'organisation sociale. En revanche, les membres des confréries populaires affichent leur appartenance au groupe en arborant leurs couleurs, rouge pour l'Ahmadiyya, vert pour la Burhâmiyya et noir pour la Rifâ'iyya, et en défilant avec leurs bannières lors des processions.

L'auteur répond ensuite à une question relative à un point doctrinal qui fit et reste l'objet de violentes polémiques, celui de l'union à Dieu (ittihâd wa hulûl) (Makhlûf, 1926 : 19). Cette notion, imputée à Ibn Arabî et ses disciples, paraît heurter de front le dogme essentiel de l'unicité divine. La divinité ne peut pas s'incarner dans l'être, précise M. H. Makhlûf, et d'affirmer que « moi c'est Toi et Toi c'est moi » (Anâ anta wa anta anâ) est contraire à la loi divine. Il explique qu'al-Hallâj et Abî Yazîd al-Bistâmî ont été condamnés l'un à mort, l'autre à l'exil, pour avoir professé des propos similaires. Cependant, ajoute-t-il, il ne faut pas confondre le concept soufi d'unicité de l'être, wahdat al-wujûd, avec « l'incarnationnisme ». En cela, il reprend un débat ancien : la doctrine de la wahdat al-wujûd a été élaborée par Ibn 'Arabî (m. 1240). Consistant à s'approcher de Dieu afin de réaliser l'unité de l'Etre et de s'immerger dans l'amour et la contemplation (shuhûd) des réalités divines, elle fut l'objet de violentes attaques de la part des fuqahâ', qui l'assimilèrent à de « l'incarnationnisme », une croyance qui aurait été reprise aux chrétiens et aux extrémistes chiites (ghulât al-shî'a) par les soufis.


L'auteur aborde enfin les mawlid-s, fêtes religieuses populaires par excellence qui font l'objet elles aussi, depuis leur développement à l'époque mamelouke, de violentes critiques. Les mawlid commémorent annuellement le jour anniversaire du Prophète, des membres de sa famille et des saints. Les grands mawlid-s du Caire appartiennent au calendrier musulman. Ces festivités attirent surtout des ruraux, ce qui explique pourquoi elles sont perçues par leurs opposants comme des marques de la piété populaire et de l'arriération des campagnes. M. H. Makhlûf cite toutes les « innovations blâmables » qui ont lieu non seulement lors de ce type de manifestations mais aussi pendant les célébrations religieuses officielles. R. Ridâ écrivait à leurs propos : « Ces fêtes (autour des tombes) servent de points de rassemblement pour les hommes, femmes et enfants mélangés, comme les deux grandes nuits, celle de la fête du sacrifice et celle de la fin du ramadan, ou encore le premier vendredi du mois de rajab : on immole des bêtes, on y prépare des mets spéciaux. On mange, on boit, on pisse, on fiente, on bavarde, on braille ; tout cela pendant que le Coran est récité par des shaykh-s aveugles que l'on paie, sans parler de tout ce qui se passe de pire. À tel point que des actes licites comme la lecture du Coran ou les formes légales de dhikr deviennent répréhensibles dans ce contexte » (Ridâ, 1926/27 : 269-270)1.


Pour M. H. Makhlûf, les mawlid-s doivent être l'occasion de se remémorer les actes et les paroles des saints et des pieux, et d'en tirer des leçons (Makhlûf, 1926 : 22). Or, il considère que les gens vont surtout aux mawlid-s pour les plaisirs profanes qu'ils procurent. À l'instar de R. Ridâ, il déplore la mixité qui règne dans les lieux du mawlid et toutes les « innovations » que l'on peut y observer, notamment lors des processions (zaffa) de la Rifâ'iyya et de la Bayyûmiyya. Il condamne le défilé de bannières, l'utilisation d'encensoirs et d'instruments de musique, notamment les castagnettes : cet instrument est surtout associé en Egypte aux danseuses du ventre. Enfin il dénonce la vénération excessive portée aux shaykh-s et se moque de ceux qui avancent à dos de cheval, en tête de la procession de leur confrérie, coiffés d'un turban ridicule, affalés sur leur monture, comme s'ils étaient ivres, et de cette foule qui se presse autour d'eux pour recevoir leur baraka.

Notes:

1 R. Ridâ est cité par J. Jomier, (1954 : 254).

samedi 14 novembre 2009

La justice divine selon Al-Ghazali


La justice divine selon Al-Ghazali

Dr Alphousseyni Cissé
Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Sénégal)



Al-Ghazali dit : « On peut penser que l'injustice c'est faire mal (à quelqu'un) tandis que la justice c'est procurer un bienfait aux gens. Or il n'en est pas ainsi. Au contraire si un roi ouvre (les portes) des armureries, des bibliothèques et des trésors et qu'il distribue ces derniers aux riches, donne les armes aux savants et met à leur disposition les citadelles donne les livres aux soldats et met à leur disposition les mosquées et les écoles, sans doute il a fait preuve de bonté toutefois il a mal fait et a dévié de (la voie) de l'équité dans la mesure où il a mis chaque chose à la place qui ne lui convenait pas. Tandis que s'il fait mal aux malades en leur donnant à boire des médicaments (amers) en leur appliquant des ventouses ainsi par force et qu'il punit les criminels par la peine capitale ou leur coupe la main ou bien les frappe du coup il s'est montré juste car il a mis les choses à la place qui leur convenait »(1).

Par conséquent le juste dit-il c'est celui qui est équitable (al-‘adil). Autrement dit c'est celui qui agit conformément à la raison et à la Loi divine selon lui. Car on ne peut connaître un homme juste que par son acte dit-il. Ainsi quiconque veut connaître Dieu en tant qu'être juste qu'il observe le royaume des cieux et de la terre dans leur ordre parfait ou plutôt qu'il considère son propre corps tout au moins pour se rendre compte de ses merveilles (‘aja'ib badanih) qui sont dérisoires par rapport à celles des cieux et de la terre dit l'auteur(2). En effet l'équité divine se traduit ainsi par le fait que Dieu a rangé chaque chose dans le macrocosme comme dans le microcosme tel que le corps humain dans l'ordre qui lui convenait dit Al-Ghazali sans quoi il y aurait imperfection et une exposition aux défauts.
Ainsi a-t-Il rangé la terre, dans le macrocosme au plus bas (asfala s-safilin) l'eau par-dessus l'air au-dessus de l'eau ensuite les cieux au-dessus de l'air à défaut de quoi leur ordonnancement serait vain selon lui.

Par conséquent la justice divine ne signifie pas seulement chez Al-Ghazali un règlement de différends entre les hommes tel que cela a été ordonné à David (que la paix soit sur lui) pour ainsi dire en ces termes : « ô David, Nous avons fait de toi un calife sur la terre. Juge donc en toute équité parmi les gens et ne suis pas la passion : sinon elle t'égarera du sentier d'Allah ». (Coran, s : 38, v : 26). Mais c'est surtout cette merveilleuse présence seigneuriale dans son équilibre (‘itidaliha) et son ordre parfait (intizamiha) qui permet de comprendre la justice de Dieu (le Très-Haut) pour quiconque réfléchit sur le royaume céleste et terrestre à l'instar d'Abraham (que la paix soit sur lui) d'après le Coran (cf. Coran, s :6, v :75). Du coup on se rend compte que Dieu est généreux (jawad). Et si l'on a du mal à comprendre cela dit l'auteur que l'on réfléchisse donc sur son propre corps comme nous l'avons déjà souligné. Mais cela est impossible pour quiconque est submergé par le désir de ce bas monde et soumis à la cupidité (al-hars) ou asservi par la passion (al-hawa) dit Al-Ghazali. Selon lui les noms divins qui dérivent des actes ne sauraient être compris que si l'on se fonde au préalable sur la connaissance ou la compréhension de ces actes eux-mêmes(3).

Par ailleurs la balance ne symbolise pas par hasard la justice si on se réfère à ce qu'en dit Al-Ghazali. En effet selon lui la balance est d'origine coranique donc spirituelle et rationnelle. Voici ce qu'il en dit : « Quiconque reçoit son enseignement du Messager d'Allah juge selon la balance divine, et quiconque s'en écarte et suit l'opinion (ar-ra'y) et l'analogie (al-qiyas ) est égaré et perdu (tarda) »(4). Certes Dieu dit à ce propos : premièrement : « et pesez avec la balance exacte » (Coran, s : 17, v : 35) ; deuxièmement : « Et Il a établi la balance afin que vous ne transgressiez pas dans la pesée donnez (toujours) le poids exact et ne faussez pas la pesée » (Coran, s : 55, v : 1-9) ; troisièmement : « Nous avons effectivement envoyé Nos messagers avec des preuves évidentes et fait descendre avec eux le Livre et la balance afin que les gens établissent la justice ». (Coran, s : 57, v : 25).

Cette balance sert à connaître Dieu (le Très-Haut), Ses anges, Ses livres, Ses messagers, Son royaume apparent et caché (malakutih) afin que du coup on connaisse la modalité de la pesée par l'intermédiaire des prophètes de même que ces derniers le savent par l'intermédiaire des anges. Tandis que Dieu est le Premier Maître, le deuxième étant Gabriel et le Messager (que Dieu le bénisse et le salue) étant le troisième maître. Toutes les créatures apprennent par l'intermédiaire des Messagers, elles n'ont pas d'autre voie en dehors de ces derniers(5).

Certes selon Al-Ghazali la balance divine fait découvrir les merveilles de l'univers et met fin aux propos du contradicteur ainsi que l'a fait Abraham (que la paix soit sur lui) face à Némrod(6). Autrement dit la balance est un critère de jugement rationnel et spirituel selon l'auteur ainsi que nous l'avons noté et un mode de connaissance des réalités divines. Elle nous fait comprendre l'unicité de Dieu (le Très-Haut)(7) à qui tout dans l'univers est soumis et gouverné par Sa puissance et Sa sagesse, par conséquent dit Al-Ghazali on ne doit injurier ni le temps (ad-dahr) ni rapporter les choses aux astres concernant sans doute leurs probables influences sur nos destins, ni nous opposer au décret divin comme on a l'habitude de le faire souligne t-il(8). Toutefois les planètes et les astres tels que le soleil et la lune influent sur les évènements qui sont adventés sur la terre selon Al-Ghazali. En effet l'alternance des quatre saisons est due aux mouvements du soleil qui évolue selon un calcul connaissable dit-il, à la base du Coran. Certes Dieu (le Très-Haut) a instauré les causes dans l'éternité de manière immuable de sorte que si on les connaît on peut prévoir leurs effets. C'est par exemple le cas de la prévision de l'éclipse du soleil dont la négation est rejetée par Al-Ghazali(9).

Or on peut dire que ces changements climatiques sur la terre qui sont ainsi dus à l'évolution du soleil ont des conséquences sur la vie de l'homme de manière évidente. Cependant ils n'influent pas sur son destin qui est déterminé dans l'éternité selon Al-Ghazali(10). En effet l'homme n'agit qu'en fonction de ce qui est déterminé pour lui dans l'éternité : s'il est destiné à être heureux il saisira les causes établies dans l'éternité concernant l'acquisition de la félicité, s'il est destiné à être malheureux il sera satisfait d'être paresseux et fainéant ce qui est une cause de son châtiment éternel ainsi que la piété et le libertinage sont des causes de la félicité et du châtiment éternel; de même que s'il prend le médicament il peut être guéri et s'il avale un poison il peut mourir.

Par conséquent la prédestination ainsi perçue par Al-Ghazali n'implique pas que l'homme n'a aucune part de responsabilité dans ses actes. Au contraire il est libre de choisir la voie qu'il veut même si celle-ci semble paradoxalement tracée dans l'éternité ; par ailleurs il affirme qu'il n'y a de salut que dans la liberté de penser(11) donc seul un paresseux et fainéant se posera la question de l'utilité ou de l'inutilité de l'action car il ne sait pas ce qui est prédestiné pour lui dans l'éternité. Par conséquent le souci (al-hamm) qui pousse à l'action est une faveur (fadl) pour l'homme de la part de Dieu (le Très-Haut) dit Al-Ghazali(12) car la recherche du paradis sans l'action est un péché puisque le bonheur ne s'obtient que par la connaissance et l'action et le manquement de sa recherche est stupidité (hamaqa)(13). Et c'est là que réside la justice divine car n'obtient la félicité que celui qui vient à Dieu avec un cœur sain or le salut du cœur est un attribut qui s'acquiert par l'effort (sifa tuktasab bis-sa‘y) de même que la jurisprudence et la fonction d'imamat sans aucune différence dit Al-Ghazali.

Par conséquent la vision négative que l'on peut avoir à l'égard de la prédestination est balayée parce que la liberté de l'homme est sauvée ainsi sans aucune véhémence comme l'affirment les Mu‘tazilites et les existentialistes. Car Dieu (le Très-Haut) est non seulement Juste mais Il est également Souverain. Il a établi des lois immuables dans le règne de l'univers et a permis à l'homme de les découvrir pour assurer son salut en s'appuyant sur la raison et la Loi divine cause pour laquelle Dieu l'a fait descendre sur la terre comme calife pour voir comment il va se conduire. En effet Al-Ghazali interprète le mot « mafatih l-ghayb » ou les clefs de l'inconnaissable, dans le Coran comme signifiant la connaissance des causes des réalités dans le monde apparent (‘alam ash-shahada) car ces causes comme nous l'avons dit sont établies par Dieu (le Très-Haut) dans l'éternité de même que toute chose déterminée existe nécessairement par décret divin dans l'éternité même si elle n'est pas nécessaire par soi souligne-t-il.
« Par conséquent en sachant tout cela, l'homme dans la quête de sa subsistance, en somme doit être apaisé dans son âme reposé dans son esprit, et nullement troublé dans son cœur.»(14).

Comme nous l'avons mentionné ailleurs(15) Al-Ghazali d'une manière caractéristique remarque que la part allotie à l'homme concernant ce nom divin à savoir le Juste (al-‘adl) consiste au fait que son premier devoir de justice envers lui-même est qu'il soumette la passion et la colère au contrôle de la raison et de la Loi divine dans le cas contraire il sera injuste envers lui-même. En ce qui concerne sa justice à l'égard de chacune des parties de son corps est qu'il l'utilise conformément à la Loi divine. Quant à sa justice à l'égard de sa famille ou ses proches ou ses subordonnés cela va de soi dit-il.
Au point de vue de la religion sa justice doit être traduite par la foi en Dieu dans sa totalité comme nous l'avons noté.

En conclusion la justice divine désigne avant tout la connaissance de l'unicité de Dieu (le Très-Haut) dans Sa toute puissance et Sa sagesse qui se manifestent dans la création de l'univers et son ordre parfait dans son ensemble selon Al-Ghazali. Certes l'homme ne saurait s'approprier une part de cela et s'y conformer qu'en s'appuyant sur la raison et la Loi divine nous dit-il(16).
Traduction :
Le sage est le législateur, l'arbitre et le juge incontestable (al-qadi l-musallam) dont le jugement est sans appel et le décret immuable. Le jugement divin concernant le droit des hommes est le fait que l'homme n'obtient que le fruit de ses efforts et qu'en vérité son effort lui sera présenté (Coran, s : 53, v : 39-40) et que les bons seront certes dans un (jardin) de délice et les libertins seront certes dans une fournaise (Coran, s : 82, v : 13-14). Le sens de Son jugement à l'égard du bon et du libertin relativement à la félicité et au châtiment c'est le fait qu'Il a mis la bonté et le libertinage comme des causes qui conduisent leurs auteurs vers la félicité et le châtiment de même qu'Il a mis la médication et le poison comme des causes qui conduisent leurs auteurs vers la guérison et la mort, dans la mesure où le sens de la sagesse revient à l'agencement des causes et le fait de les orienter en direction des causés (al-musabbabat) du coup celui qui en est décrit d'une manière générale est un sage d'une manière générale (hakaman mutlqan) car il est la cause de toutes les causes dans leur ensemble et leur détail ; or c'est à partir du sage que s'opèrent le décret (al-qada') et l'arrêt (al-qadar). En effet Sa détermination est l'origine de l'existence des causes afin que Son jugement s'applique aux causés et le fait qu'Il établit toutes les causes fondamentales solides éternelles et immuables-telles que la terre, les sept cieux, les astres, les planètes et leurs mouvements correspondants qui sont immuables et éternels- jusqu'à ce que l'Ecriture arrive à son terme est Son décret ainsi que le Très-Haut dit : « Il décréta d'en faire sept cieux en deux jours et révéla à chaque ciel sa fonction » (Coran, s : 41, v : 12) ; et l'orientation de ces causes par leurs mouvements correspondants fixés, déterminés et calculés en direction des causés qui en sont adventés instant après instant est Son arrêt.

Par conséquent le jugement est la première création totale et l'ordre éternel qui est comme un clin d'œil, le décret est la détermination totale de toutes les causes éternelles, l'arrêt est l'orientation de toutes les causes par leurs mouvements éternels et calculés en direction des causés dénombrés et fixés selon une mesure connaissable qui n'augmente ni ne diminue, cause pour laquelle rien n'échappe à Son décret et à Son arrêt.

Tu ne peux comprendre cela que par un exemple : peut-être as-tu vu l'horloge grâce à laquelle on connaît les heures de prière, et si tu ne l'as pas vue cela revient en tout au fait qu'elle nécessite un instrument en forme de tube renfermant une quantité d'eau connaissable, un autre instrument creux placé à l'intérieur au-dessus de l'eau et un fil solide dont un bout est lié à cet instrument et l'autre bout au bas d'un petit godet placé au-dessus du tube creux et dans lequel il y a un ballon au-dessous duquel il y a une soucoupe, de telle sorte que si le ballon chute il tombe sur la soucoupe et on entend son tintement, puis on fait un trou dans le tube instrumental selon une mesure connaissable à partir duquel l'eau descend petit à petit. Lorsque le niveau de l'eau baisse du même coup baisse l'instrument creux placé sur la surface de l'eau, le fil solide qui en est lié se détend en mettant en mouvement le godet contenant le ballon de manière à le renverser complètement, par conséquent le ballon roule et tombe sur la soucoupe en tintant, et à la fin de chaque heure cela recommence.

Certes l'espace qui sépare les deux moments est déterminé en fonction de l'écoulement de l'eau et l'abaissement de son niveau, cela est lié à la dimension de la largeur du trou à travers lequel descend l'eau et on le connaît par calcul. Par conséquent l'eau descend selon une quantité déterminée et connaissable, à cause de la détermination de la largeur du trou d'une manière connaissable, du même coup se produit l'abaissement du niveau supérieur de l'eau selon cette quantité dont dépendent la détermination de l'abaissement de l'instrument creux et la tension du fil solide qui en est lié, le mouvement se déclenche dans le godet contenant le ballon. Or tout cela est déterminé en fonction de la détermination de sa cause, celle-ci n'augmente ni ne diminue. On peut considérer la chute du ballon dans le godet comme une cause d'un mouvement qui est lui-même la cause d'un troisième mouvement ainsi de suite jusqu'à plusieurs enchaînements au point qu'il en découle des mouvements étonnants et déterminés selon des quantités fixées ; or leur première cause est la descente de l'eau selon une mesure connaissable.

Si tu te représentes cette figure, sache que son créateur a besoin de trois choses :
1) la création (at-tadbir) à savoir le jugement concernant ce qu'il faut comme instruments, moyens (litt. causes) et mouvements jusqu'à ce qu'il arrive à acquérir tout ce qu'il faut pour cela. En effet tel est le jugement.
2) l'existentiation (ijad) de ces instruments qui sont fondamentaux à savoir le tube instrumental pour contenir l'eau, l'instrument creux à placer sur la surface de l'eau, le fil solide qui en est lié, le godet dans lequel il y a le ballon et la soucoupe sur laquelle tombe le ballon ; or tel est le décret.
3) l'établissement (nasb) d'une cause qui nécessite (le déclenchement) d'un mouvement déterminé calculé et fixé, à savoir faire un trou au bas de l'instrument selon une largeur déterminée afin qu'il s'y déclenche par la descente de l'eau un mouvement à la surface de l'eau ainsi, puis le mouvement de l'instrument creux placé à la surface de l'eau puis celui du fil ensuite du godet contenant le ballon ensuite le mouvement de celui-ci ensuite son choc contre la soucoupe en tombant légèrement puis le tintement qu'il produit avertissant les présents qui l'entendent et se mettent en mouvement pour accomplir la prière et les travaux en prenant connaissance de l'heure.
Or tout cela se passe selon une mesure connaissable et une quantité déterminée par une cause selon la mesure du premier mouvement à savoir celui de l'eau.
Si tu as compris que ces instruments sont fondamentalement nécessaires pour (déclencher) le mouvement qui doit être nécessairement déterminé pour que soit déterminé ce qui en résulte ainsi donc comprends l'advention des évènements dont aucune chose ne se fait ni avant ni après lorsque leur terme arrive à savoir en présence de leur cause. Or tout cela est fondé sur une mesure connaissable et que Dieu atteint ce qu'Il se propose étant donné qu'Il a assigné une mesure à chaque chose (Coran, s : 65, v : 3).

Par conséquent les cieux, les planètes, les astres, la terre, la mer, l'air et les corps macrocosmiques dans l'univers sont comme ces instruments ; la cause motrice des planètes est comme ce trou nécessitant la descente de l'eau selon une mesure connaissable. L'influence du mouvement du soleil, de la lune et des astres sur l'advention des évènements sur la terre est similaire à celle du mouvement de l'eau pour le déclenchement des mouvements qui influent à leur tour sur la chute du ballon indiquant l'heure.

Par exemple les mouvements du ciel entraînent des changements sur la terre ainsi le soleil lorsqu'il atteint l'orient et que le monde est éclairé et que les gens voient facilement du même coup il leur est facile de vaquer à leurs occupations. Lorsqu'il atteint l'occident cela leur devient difficile donc ils regagnent leurs demeures. Lorsqu'il se rapproche du milieu du ciel et au zénith au-dessus de la tête des habitants des contrées (litt. climats) l'air se raréfie et l'été apparaît fortement les fruits mûrissent. Lorsqu'il s'éloigne l'hiver apparaît et le froid devient intense. Lorsqu'il est dans une position médiane le climat devient tempéré le printemps apparaît, la terre est couverte par la végétation, la verdure apparaît.
Par conséquent compare ces réalités bien connues avec celles qui sont étonnantes et que tu ne connais pas.

En effet l'alternance de toutes ces saisons est déterminée selon une mesure connaissable car elle est liée aux mouvements du soleil et de la lune : « Le soleil et la lune (évoluent) selon un calcul (minutieux) » (Coran, s : 55, v : 5) à savoir leur mouvement selon un calcul connaissable. Par conséquent telle est la détermination et l'agencement de toutes les causes est le décret tandis que la première création qui est comme un clin d'œil est le jugement or Dieu est Juge et Juste selon l'expression de ces réalités ; de même que le mouvement de l'instrument, du fil et du ballon n'est pas en dehors de la volonté de celui qui a mis en place l'instrument, au contraire c'est ce qu'il veut en agissant de la sorte, en va-t-il de même pour chaque évènement qui se produit dans l'univers mauvais ou bon utile ou nuisible, il n'est pas en dehors de la volonté de Dieu (qu'Il soit exalté et magnifié) ; au contraire telle est la volonté de Dieu (le Très-Haut) et c'est pour cela qu'Il a créé ses causes, tel est le sens de Sa parole : « c'est pour cela qu'Il les a créés (Coran, s : 11, v : 119).

Or faire comprendre les réalités divines par des exemples ordinaires est difficile, mais le but est l'avertissement ; par conséquent laisse là les exemples et suis le but ; gare à la représentation et à la ressemblance !
Remarque : Tu as compris par l'exemple mentionné ce qu'il y a chez l'homme comme jugement, création décret et arrêt, car cela est une chose facile, toutefois le danger est la création des exercices et des combats spirituels ainsi que la détermination de la conduite des affaires qui influent sur les bienfaits de la religion et de la vie ici-bas cause pour laquelle Dieu a placé Ses serviteurs comme califes sur la terre et les y fait vivre afin qu'Il voie comment ils vont se conduire.

Toutefois la part allotie (à l'homme) au point de vue de la religion concernant la constatation de cet attribut de Dieu (le Très-Haut) est qu'il sache que l'affaire est terminée définitivement (mafrugh) venant de Dieu et qu'elle n'est pas nouvelle, la plume a séché concernant l'étant, que les causes sont déjà orientées en direction des causés et que leur acheminement en direction de ces derniers à leurs instants et à leurs termes est une décision nécessaire. En effet tout ce qui entre dans l'existence l'est par nécessité même s'il n'est pas nécessaire en soi toutefois il est nécessaire par décret éternel qui est sans appel.

Par conséquent qu'il sache que ce qui est déterminé est existant et que le souci (al-hamm) est une faveur (fadl). Par conséquent l'homme doit être, dans la quête de sa subsistance apaisé dans son âme, reposé dans son esprit et nullement troublé dans son cœur.
Si tu dis : « il s'impose nécessairement à lui deux problèmes :
1) comment le souci peut-il être une faveur alors qu'il est également déterminé, car il lui est déterminé une cause qui une fois présente le souci se produit nécessairement ?
2) si l'affaire est définitivement terminée de la part de Dieu à quoi sert l'action alors que s'en est fini concernant la cause de la félicité et du châtiment ? ».
La réponse à la première question c'est que leur dire : ce qui est déterminé existe et que le souci est une faveur ne signifie pas que celle-ci l'est par rapport à ce qui est déterminé extérieur à celui-ci mais au contraire c'est une faveur à savoir une frivolité (laghw) sans utilité, car elle ne repousse pas ce qui est déterminé. Or la cause liée au souci en quoi il existe est l'ignorance pure, car si son existence était déterminée donc gare ! Le souci ne peut pas le repousser, ce qui est le fait de hâter une sorte de douleur de peur que la douleur ne se produise, et si son existence n'est pas déterminée donc le souci n'a pas de sens à cet égard.
Par conséquent dans ces deux cas le souci est une faveur. En ce qui concerne l'action la réponse est selon ce que dit le Prophète (que Dieu le bénisse et le salue) : « Œuvrez à tout un chacun est facilité ce qui est créé pour lui. » Cela signifie que quiconque est destiné à être heureux c'est dû à une cause déterminée du même coup il agit en fonction de cela à savoir l'obéissance, et quiconque est destiné à être malheureux, que Dieu nous en préserve ! Cela (également) est dû à une cause à savoir sa fainéantise à l'égard des causes de celle-ci.
La cause de sa fainéantise peut relever du fait qu'il est ancré dans son esprit la pensée de se dire : « si je suis destiné à être heureux donc je n'ai pas besoin de travailler, et si je suis destiné à être malheureux donc l'action ne me sert à rien ».

Or cela est de l'ignorance car il ne sait pas que s'il est destiné à être heureux c'est parce qu'il survient en lui les causes de la félicité par la connaissance et l'action dans le cas contraire c'est donc le signe (litt. l'incitation) de son châtiment. C'est par exemple celui qui espère devenir juriste atteignant le degré de l'imamat. Par conséquent on lui dit fournis de l'effort et exerce-toi. Il répond si Dieu (qu'Il soit exalté et magnifié) a décrété dans l'éternité que je serai imam donc je n'ai pas besoin de fournir de l'effort et s'Il a décrété que je serai ignorant donc l'effort ne me sert à rien. On lui répond si cette pensée s'impose à toi cela prouve qu'Il a décrété que tu seras ignorant ; car quiconque est destiné éternellement à être imam néanmoins il le concrétise par ses causes Dieu lui apporte celles-ci et il agit en fonction d'elles Il repousse à son égard les pensées qui l'entrainent à la paresse et à la fainéantise. Au contraire quiconque ne fournit aucun effort n'obtient pas du tout le degré de l'imamat, et quiconque fournit un effort et que les causes lui sont facilitées il peut réaliser son souhait s'il poursuit son effort jusqu'au bout et qu'il ne rencontre pas d'obstacle sur son chemin.

Par conséquent n'obtient la félicité que celui qui vient à Dieu avec un cœur sain, or le salut du cœur est un attribut qui s'acquiert par l'effort de même que la jurisprudence et l'attribut d'imamat, sans différence.
Oui ! Les hommes concernant (le nom divin) le Sage se situent à différents niveaux. D'aucun considère la fin à savoir ce qui l'attend, un autre le commencement à savoir ce qui est décrété pour lui dans la prééternité cela est plus important car la fin suit le commencement, un autre se détourne du passé et du futur, il est le fils de son temps, il le considère, satisfait des évènements selon le décret de Dieu (qu'Il soit exalté et magnifié) et ce qui s'y manifeste cela est encore plus important que ce qui précède. Un autre se détourne du présent, du passé et du futur, le cœur submergé par le Sage, attaché à la vision de Dieu, or tel est le degré le plus élevé.
Le juste (al-‘adl) désigne l'équitable (al-‘adil) à savoir celui de qui découle l'acte d'équité contraire à l'injustice ; or nul ne peut connaître (un homme) équitable tant qu'il ne connaît pas son équité et on ne peut connaître son équité qu'en connaissant son acte. En effet quiconque veut comprendre cet attribut (al-wasf) il lui faut comprendre (d'abord) dans leur totalité les actes de Dieu (le Très-Haut) depuis le royaume des cieux jusqu'à la limite de la terre humide au point qu'il ne voit pas de disproportion en la création du Tout Miséricordieux ; puis ramène sur elle le regard et n'y voit une brèche quelconque puis retourne son regard à deux fois son regard lui revient humilié et frustré alors qu'il est émerveillé par la beauté de la présence seigneuriale et rendu perplexe par son équilibre et son ordonnancement ; du coup il saisit quelque chose parmi les significations de la justice de Dieu (qu'Il soit magnifié et sanctifié).

En effet Il a créé les classes d'existants, les êtres matériels et les êtres spirituels, les êtres parfaits et les êtres imparfaits, en donnant à chacun d'eux ce qui lui convenait dans la création par conséquent Il est généreux (jawad). Il les a rangés à la place qui leur convenait du coup Il est équitable. Ainsi parmi les corps macrocosmiques il y a la terre, l'eau, l'air, les cieux et les astres. Il les a créés et rangés. Il a placé la terre au plus bas l'eau par-dessus, au-dessus de l'eau l'air, au-dessus de l'air les cieux. Certes si cet ordre fait défaut leur ordonnancement serait vain.

Peut-être que cette figure de réalisation de cet ordonnancement afférent à la justice et à l'ordre est quelque chose de difficile à comprendre pour la plupart des esprits, par conséquent mettons-nous au niveau des gens ordinaires (al-‘awamm). Nous disons donc que l'homme considère son propre corps, certes il est composé de différentes parties de même en va-t-il pour l'univers composé (également) de différents corps. La première différenciation chez l'homme est que Dieu l'a composé d'os, de chair et de peau. Il a fait de l'ossature une charpente intérieure protégée par la chair qui est protégée (elle-même) par la peau. En effet si cet ordre est inversé et qu'Il fait apparaître ce qu'Il a caché l'ordonnancement serait vain.
Par conséquent si cela t'est caché (sache) qu'Il a créé pour l'homme différentes parties telles que les mains, les pieds, les yeux, le nez et les oreilles. Du coup par cette création des parties Il est généreux, et en les rangeant à la place qui leur convenait du coup Il est équitable ; car Il a placé les yeux à l'avant du corps, étant donné que s'Il les avait placés à la nuque ou au pied ou bien à la main ou au sommet de la tête il est évident que ce serait une imperfection et une exposition aux défauts. C'est ainsi qu'Il a lié les mains aux épaules, s'Il les avait liées à la tête ou à la ceinture (al-haq') ou bien aux genoux, il est évident que cela causerait des entraves. C'est ainsi qu'Il a placé les sens au niveau de la tête. En effet ce sont des espions (jawasis) afin qu'ils illuminent tout le corps. S'Il les avait rangés au niveau des pieds leur ordre s'en trouverait entravé indubitablement. Or l'explication de cela concernant chaque partie est longue.
D'une manière générale il faut que tu saches que rien n'est créé dans un endroit sans que cela soit convenable. En effet s'Il l'avait placé soit à droite soit à gauche, soit en bas soit en haut ce serait imparfait ou vain ou bien laid ou bien non-conforme à l'ordre et détestable pour le regard ; de même que si le nez était créé au milieu du visage ou au front ou bien à la joue ce serait une imperfection concernant son utilité.

Si tu as bien compris cela d'une manière certaine sache que le soleil également Dieu ne l'a pas créé au quatrième ciel, à savoir dans la position médiane des sept cieux par plaisanterie (hazlan) au contraire Il ne l'a créé qu'en toute vérité et ne l'a placé qu'à l'endroit convenable afin d'atteindre les buts qu'Il vise. Toutefois peut-être que tu es incapable de saisir la sagesse qui en est sous-adjacente car tu réfléchis peu sur le royaume des cieux, de la terre et leurs merveilles. En effet si tu les avais observés tu aurais vu des merveilles qui te rendront dérisoires celles de ton propre corps. Et comment non ! Alors que la création des cieux et de la terre est plus grande que celle des hommes. Plût à Dieu que tu accomplisses la connaissance de tes propres merveilles, que tu y réfléchisses complètement et ce qui les entoure comme corps du coup tu seras du nombre de ceux à propos de qui Dieu (qu'Il soit exalté et magnifié) dit : « Nous leur montrerons nos signes dans les horizons et en eux-mêmes » (Coran, s : 41, v : 53). Et comment es-tu donc pour que tu sois du nombre de ceux à propos de qui Il dit : « Ainsi avons-Nous montré à Abraham le royaume des cieux et de la terre » (Coran, s : 6, v : 75). Comment les portes du ciel peuvent-elles s'ouvrir pour quiconque est submergé par le souci du bas monde et asservi par la cupidité et la passion ?

Par conséquent tel est le signe (ar-ramz) concernant la compréhension préalable de la voie de la connaissance de cet unique nom (divin). Son explication demande des tomes, il en est de même pour le commentaire de chaque nom divin. Les noms divins qui dérivent des actes ne sauraient être compris avant la compréhension des actes. Or tout ce qui se trouve dans l'existence en fait d'actes de Dieu (le Très-Haut) quiconque ne les embrasse pas en détail et en totalité par la connaissance n'en possède qu'un simple commentaire et la langue. Or il n'y aucun moyen de les connaître en détail car leur connaissance est sans limite. Concernant leur ensemble l'homme en possède une voie et selon l'étendue de la connaissance qu'il en a il tire sa part de la connaissance des noms divins ; or cela englobe toutes les connaissances. Néanmoins le but d'un tel livre est l'allusion (al-ima') à leurs clés (mafatihiha) et la conclusion de leur ensemble seulement.
Remarque : La part allotie à l'homme concernant (ce nom divin) le Juste est évidente. La première chose qui lui incombe comme équité dans ses propres attributs est qu'il mette la passion et la colère sous le contrôle de la raison et de la religion. En effet tant qu'il asservira la raison par la passion et la colère il sera injuste. Tel est l'ensemble de son équité envers lui-même ; quant au détail il doit veiller sur les limites (fixées) par la Loi divine d'une manière totale. Son équité concernant chaque partie de son corps est qu'il l'utilise conformément à la Loi divine. Quant à son équité envers sa famille ses proches et ceux qui sont sous sa responsabilité s'il en a est évidente.

On peut penser que l'injustice c'est faire mal (à quelqu'un) tandis que la justice c'est procurer un bienfait aux gens. Or il n'en est pas ainsi. Au contraire si un roi ouvre (les portes) des armureries, des bibliothèques et des trésors et qu'il distribue ces derniers aux riches, donne les armes aux savants et met à leur disposition les citadelles donne les livres aux soldats et met à leur disposition les mosquées et les écoles, sans doute il a fait preuve de bonté toutefois il a mal fait et a dévié de (la voie) de l'équité dans la mesure où il a mis chaque chose à la place qui ne lui convenait pas. Tandis que s'il fait mal aux malades en leur donnant à boire des médicaments (amers) en leur appliquant des ventouses ainsi par force et qu'il punit les criminels par la peine capitale ou leur coupe la main ou bien les frappe du coup il s'est montré juste car il a mis les choses à la place qui leur convenait.

La part allotie à l'homme concernant la constatation de cet attribut au point de vue de la religion est la foi en Dieu (qu'Il soit exalté et magnifié) ce qui est justice et qu'il ne s'oppose pas à Lui dans Son action et Son décret ainsi que dans le reste de Ses actes, que cela soit en adéquation avec son désir ou non. Car tout cela est justice ; c'est ainsi et c'est comme tel. Certes s'Il avait agi autrement il en découlera un mal plus grand que ce qui est arrivé, de même que le malade si on ne lui applique pas les ventouses il souffrira davantage. Ainsi donc Dieu (le Très-Haut) est Juste. La foi en Lui met fin à la négation et à l'opposition de manière manifeste et cachée. En définitive qu'il n'injurie pas le temps, ne rapporte pas les choses (à l'influence) des astres et ne s'y oppose pas ainsi qu'on le fait d'habitude. Au contraire qu'il sache que tout cela constitue des causes assujetties à (Dieu) ordonnées et orientées en direction des causés (al-musabbabat) selon la plus belle manière (litt. orientation) au plus haut degré de l'équité et de la subtilité.

Notes :
1 - Al Ghazali : al-Maqsad l-asna fi sarh ma‘ani asma'i llah l-husna, 1ère edition, Beyrouth 2003/ 1424, p. 100.
2 - Ibid., p. 99.
3 - Al Ghazali : Rawdat at-talibin wa ‘umdat as-salikin, in Majmu‘at rasa'il, Beyrouth 1986/1406, p. 66. Voir également Daniel Gimaret : Les noms divins en Islam, les éditions du Cerf, Paris 1988, p. 346.
4 - Cf. Al Ghazali : al-Qistas l-mustaqim, in Majmu‘at rasa'il, p. 8.
5 - Ibid., p. 9.
6 - Cf. Alphousseyni Cissé : Quelques aspects de la pensée d'Al-Gazali in Ethiopiques, revue négro-africaine de littérature et de philosophie 2005, p. 61.
7 - Idem : L'unicité divine selon Al-Gazali, in Annales de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines, université Cheikh Anta Diop, Dakar, n° 33, 2003, pp. 1 - 9.
8 - Al Ghazali : al-Maqsad, p. 101.
9 - Alphousseyni Cissé : Quelques aspects de la pensée d'Al-Gazali, p. 61.
10 - Al Ghazali : al-Maqsad, p. 97.
11 - Alphousseyni Cissé : op. cit., p. 60.
12 - Al Ghazali : al-Maqsad, p. 96.
13 - Alphousseyni Cissé : L'Islam n'est pas une idéologie, in Annales de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines, université de Dakar, numéro 37/ B-2007, p. 4.
14 - Al Ghazali : al-Maqsad, p. 96.
15 - Alphousseyni Cissé : La vie et la mort selon Al-Gazali, in Annales de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines, Dakar, n° 32 , 2002, pp. 241 - 251.
16 - Al Ghazali : al-Maqsad, pp. 100 - 101.

Source: http://annales.univ-mosta.dz/fr9/cisse.htm

vendredi 13 novembre 2009


Le crédit immobilier islamique propose d’autres solutions

par Yusuf Talal DeLorenzo
08 mai 2009


Washington – Le modèle commercial et la croissance du secteur de la finance islamique - le seul système financier qui soit encadré par les enseignements d’une grande religion – pourrait présenter de nouvelles chances pour les foyers américains – aussi bien musulmans que non musulmans.

Le secteur du crédit immobilier islamique est très actif dans près de 40 états des Etats-Unis. Quoique fonctionnant sur un modèle financier sans intérêts, les institutions islamiques de financement des acquisitions immobilières sont en tout compatibles avec le capitalisme moderne, au même titre que les institutions financières classiques.

Il existe pourtant certaines différences.

Le modèle islamique repose sur le principe selon lequel l’action de prêter est un acte charitable et non commercial, et que la dette ne peut donc être exploitée pour un profit.

Au contraire, la finance islamique s’inspire d’un modèle participatif qui vise à faire entrer toutes les parties dans un partenariat où chacun partage les risques et les bénéfices, sans garantie de profits.

En interdisant la perception d’intérêts, l’islam interdit aussi en fait le “désintérêt”, puisque les partenaires sont incités à pratiquer une gestion active, doublée de transparence, de responsabilité et d’un contrôle concerté.

Dans le crédit islamique aux ménages, la banque et son client-partenaire acquièrent conjointement un bien immobilier en tant que co-investisseurs. Là où les banques traditionnelles profitent des intérêts, les sociétés de financement immobilier islamiques trouvent leurs bénéfices dans les accords de copropriété aux termes desquels la société de crédit reçoit de son client-partenaire un loyer proportionnel à sa mise de fonds.

En règle générale, ces remboursements sous forme de “loyer plus amortissement” sont égaux à ce que seraient des remboursements sous forme d’”interêt et principal” . Lorsque le client-partenaire accède à la pleine propriété de sa maison, les remboursements locatifs à la banque prennent fin.

Dans la mesure où le crédit immobilier islamique s’adresse à des primo-acquéreurs qui, pour des raisons de conscience ou financières ne peuvent envisager des hypothèques traditionnelles avec intérêts, cette formule continue de s’étendre et de prospérer à mesure que les banques islamiques déploient leurs services sur le marché américain, même en cette époque de crise économique et de contraction du marché du travail.

Les trois principales sociétés de crédit immobilier islamique (la Devon Bank à Chicago, Guidance Residential en Virginie et University Bank dans le Michigan) font savoir qu’elles ont “substantiellement accru” leurs activités au cours des deux premiers mois de 2009 par rapport à la même période de 2008. La Devon Bank signale que son volume d’affaires pour cette même période a quasiment doublé.

Conforme au principe de partenariat et de partage du risque, le crédit immobilier islamique est plus intéressant pour l’acquéreur américain parce qu’il est fondé sur des contrats sans recours. Cela signifie que le créancier ne peut exiger de son débiteur, en cas de défaut de paiement, une somme supérieure à la valeur réelle de son bien. S’il est vrai que, dans certains états, le droit des hypothèque traditionnel respecte bien ce principe, il n’en va pas de même ailleurs où, même si la valeur du bien tombe au dessous du montant financé, la société de crédit peut exiger le remboursement de la totalité de la dette. Dans le financement islamique, le créancier ne peut exercer aucun recours au titre des autres biens de son débiteur.

Les sociétés de crédit immobilier islamiques se montrent aussi plus enclines à restructurer la dette de leur client qu’à les mettre en défaut de paiement. Ainsi, les trois principales institutions de crédit islamiques affichent un taux d’impayés de moitié inférieur à celui des crédits hypothécaires classiques.

Certes, ce secteur de crédit (estimé à moins d’un milliard de dollars par an pour chacune des trois grandes institutions américaines) reste encore modeste. Mais avec son moindre taux de mises en demeure, accompagné d’une volonté de restructurer les prêts, il donne un bon exemple de ce que peut être une philosophie de partenariat responsable et de responsabilité partagée.

Le temps est peut-être venu d’un retour à des valeurs éthiques et religieuse dans la pratique bancaire en générale et dans le crédit immobilier en particulier. En 2009, alors que le monde entier cherche des solutions à la crise financière qui l’accable, le but de la finance islamique, comme celui de tout commerce florissant, doit être de faire des affaires en partageant son savoir-faire avec d’autres.

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* Yusuf Talal DeLorenzo est responsable de la charia auprès de la société américaine Shariah Capital Inc. Article écrit pour le Service de Presse de Common Ground (CGNews).


Source:
www.commongroundnews.org

mardi 3 novembre 2009

Un soufi réformiste, le shaykh Muhammad Hasanayn Makhlûf (1861-1936) (5sur8)


Des écrits apologétiques


La liste des écrits (au nombre de 37) de M. H. Makhlûf témoigne de la formation éclectique que recevaient les 'ulamâ' de son époque. M. H. Makhlûf est l'auteur de nombreux textes, sous forme d'épîtres, de commentaires ou de gloses, dans diverses disciplines des sciences traditionnelles (al-'ulûm al-naqliyya) et des sciences de l'esprit (al-'idûm al-'aqliyya). Il se présente comme un spécialiste de jurisprudence, d'exégèse coranique et d'adab. Sept titres portent sur le soufisme ou sur des pratiques religieuses qui lui sont liées comme le culte des saints. Ils se divisent en deux catégories : les ouvrages destinés au cercle fermé des disciples et ceux destinés à un public plus large. Les premiers ne se trouvent pas dans les bibliothèques, ils circulent à l'intérieur de la confrérie et se résument à trois titres : une édition des oraisons et litanies (awrâd) propres à la voie (tarîqd) Khalwatiyya, demandée par son maître Ahmad Sharqâwî (Makhlûf, 1963) ; les commentaires de ce dernier sous la forme de deux ouvrages, le premier portant sur la théologie (Sharqâwî, 1889a), et le second sur les techniques du dhikr (Sharqâwî, 1889b). Les quatre autres écrits, rédigés pour un public plus large, sont surtout axés sur la défense du soufisme : ils sont édités et se trouvent tous à la Bibliothèque nationale, certains classés dans le domaine du fiqh. L'auteur, en effet, y expose les fondements juridiques de pratiques religieuses largement développées par les soufis comme la visite des saints et la recherche de leur intercession. Ces écrits sont souvent pauvres car apologétiques, les questions purement doctrinales sont occultées ; mais ils témoignent de la réaction des soufis lettrés aux profonds changements qui se sont produits au sein du soufisme égyptien au XXe siècle. Dans sa volonté de redonner sa place au soufisme véritable, M. H. Makhlûf cherche d'abord à « l'innocenter » des pratiques introduites par ceux qu'il nomme les pseudo-soufis (ad'iyâ'al-tarîq) : à ces yeux, ce sont eux qui ont contribué à jeter le discrédit sur le soufisme.


Son système de défense du soufisme a été analysé à partir de son épître sur l'intercession des prophètes et des saints, déjà citée, et de son ouvrage intitulé Paroles fermes contre les imposteurs et faux-soufis paru en 1926 (Makhlûf, 1926). Dans ce dernier ouvrage, il répond à des questions qui lui avaient été posées bien des années auparavant, en 1894, par des 'ulamâ'.