mardi 1 septembre 2009

Un soufi réformiste, le shaykh Muhammad Hasanayn Makhlûf (1861-1936)(2sur8)


Un soufi réformiste, le shaykh Muhammad Hasanayn Makhlûf (1861-1936)(2sur8)

Un article de Rachida Chih

Du village à al-Azhar



Le shaykh Muhammad Hasanayn Makhiûf a suivi la formation, classique à son époque, qui menait de l'apprentissage du Coran et des textes religieux de base à l'école coranique (kuttâb) du village, à la poursuite d'études supérieures à la mosquée-université d'al-Azhar au Caire. Les longues années passées à la mosquée afin d'y acquérir une solide formation en sciences religieuses ou d'y faire carrière étaient sanctionnées par l'obtention d'une ou plusieurs ijâza (certificat de transmission du savoir). Par la suite, ces lettrés s'installaient au Caire, ou retournaient dans leur région d'origine où ils occupaient diverses fonctions cultuelles (imâm, prédicateur — khâtib) et/ou jurisprudentielles (muftî). Une minorité seulement parvenait à faire de brillantes carrières au Caire, à l'instar de M. H. Makhlûf.


Le personnage est connu de l'historiographie égyptienne : il a droit à une notice dans les dictionnaires biographiques de Khayr al-dîn al-Ziriklî et de Zakî Mujâhid1. En outre, Muhammad Abduh al-Hajjâjî lui a consacré un chapitre dans son ouvrage intitulé Les grandes figures de Haute-Egypte au XIVe siècle de l'hégire (al-Hajjâjî, 1969 : 93-112).


M. H. Makhlûf fait sa carrière à al-Azhar où il gravit peu à peu tous les échelons. Il descend d'une lignée d'azhariens de Banî 'Adî, ville illustre en raison du nombre de 'ulamâ' qui en sont issus : certains sont devenus célèbres, tels le shaykh d'al-Azhar, 'Alî al-Sa'îdî (m. 1774)2 et son élève Ahmad al-Dardîr al-Adawî (m. 1786)3. À l'époque où M. H. Makhlûf étudiait à al-Azhar, au tournant du XXe siècle, l'Université connaissait les premières tentatives de réformes de l'enseignement. Au terme de dix années d'études, le shaykh d'al-Azhar, M. al-Inbâbî (m. 1896)4 choisit Muhammad parmi les deux malékites susceptibles de se présenter aux examens en vue de l'obtention du diplôme al-'âlimiyya, suivant en cela les récentes réformes qui avaient eu lieu à al-Azhar (al-Hajjâjî, 1969 : 96). Le nouveau règlement, fixé par al-Abbâsî al-Mahdî (m. 1897)5 stipulait, en effet, que « chaque année six étudiants seulement étaient autorisés à se présenter aux examens qui ouvraient aux lauréats l'accès au statut de professeur » (Delanoue, 1982 : 173). Le système des ijâza était révolu. Le shaykh d'al-Azhar donna à M. H. Makhlûf un sujet portant sur les fondements de la jurisprudence (usûl al-fiqh), que ce dernier présenta sous forme de leçon inaugurale. Le jury, présidé par le shaykh al-Inbâbî, était composé de professeurs connus, dont le shaykh Ahmad al-Rifâ'î et le shaykh Sâlim al-Bishrî (m. 1917). Muhammad réussit avec tous les honneurs et devint professeur en 1887, avec le droit d'enseigner la matière ou l'ouvrage de son choix. En effet, un simple professeur à al-Azhar ne pouvait étudier un ouvrage sans en avoir au préalable reçu l'autorisation (idhn) du shaykh d'al-Azhar ou des grands 'ulamâ'.


Notes

1 K. al-Ziriklî, Al-A'lâm, Le Caire, 1954-58, tome VI, p. 96. Z. Mujâhid, Al-A'lâm (...)

2 5 Jabartî, 'A. al-R., 'Ajâ'ib al-âthâr fi'l-tarâjim wa'l-akhbâr ; Philipp, Schwald, 1994 : (...)

3 Cf. la notice que G. Delanoue consacre à ce personnage, 198 : I, 195

4 Juriste, il fut nommé recteur d'al-Azhar une première fois en 1881, puis une deuxième fois en (...)

5 Shaykh d'al-Azhar de 1871 à 1881, puis de 1882 à 1886.

Aucun commentaire: